Vu le niveau et l’évolution des scores du Front National, si
les institutions restent ce qu’elles sont, ce parti, quel que soit son futur
nom, risque bien de prendre seul les rênes du pouvoir prochainement. C’est
pourquoi il faut rapidement rendre nos institutions réellement démocratiques.
Dans quelques années, il sera trop tard.
En effet, avec le scrutin majoritaire, qui est utilisé à
quasiment toutes les élections en France sous des formes diverses (seules les
élections européennes y échappent), il suffit de recueillir 25% à 30% des voix
pour obtenir la majorité des sièges. C’est le cas à l’Assemblée Nationale, bien
sûr, mais aussi et surtout aux élections locales : aux municipales par
exemple, la liste arrivée en tête obtient une prime de 50% des sièges, ce qui
lui assure une écrasante majorité, quel que soit son score.
Ce caractère bien faiblement démocratique, que je dénonce depuis des années, devient
un danger avec la montée d’un parti aussi peu consensuel que le Front National :
son score atteindra bientôt le seuil de 25% à 30% lui permettant, avec ce mode
de scrutin, d’avoir une majorité absolue dans de nombreuses assemblées.
D’ailleurs, on peut se demander si ce malaise, cette tension
qui se sont profondément installés entre différentes parties de la population
française ne viendraient pas, au moins en partie, de leur très mauvaise
représentation politique.
Qu’il s’agisse des habitants des quartiers populaires, en
grande partie issus de l’immigration et dont une part significative ne se sent pas inclus dans le débat politique et s’abstient
de voter, ou de populations qui se sentent menacées et mal entendues et qui se
tournent vers un parti d’extrême droite, il est à noter qu’elles sont absentes
ou presque de la représentation nationale.
Alors que l’une des vertus de la démocratie est de pacifier
les sociétés en permettant que les tensions s’apaisent dans l’échange, la
discussion et le partage des responsabilités publiques, nos institutions
interdisent cette rencontre et renforcent ainsi les clivages, les frustrations
et l’animosité.
Avec un scrutin intégralement
proportionnel, nous n’en serions peut-être pas là.